Nous avons un problème générationnel

Il faut le dire et le résoudre avant que le problème ne nous mange. On a un problème de générations.

Les boomers d’abord. Qu’ils le veuillent ou non, ils ont tout. L’immobilier, le capital, le Président de la République. Car il a beau se revendiquer de la modernité, monsieur Macron est un boomer qui se planque derrière un costume. Elevé par des boomers, marié à une boomeuse, élu par des boomers, et qui ne dirige que pour eux car ils font les élections de la République et des conseils d’administration.

Ils méprisent les réseaux sociaux, au mieux se retrouvent entre eux sur Facebook là où personne d’autre ne va jamais. Ils n’ont pas connu l’insécurité économique, ont acheté un bien immobilier avec un salaire par famille qui aujourd’hui vaut une fortune, et expliquent à la génération chômeurs / auto-entrepreneur, que c’est leur faute s’ils n’y arrivent pas.

Les actifs ensuite. La génération Twitter et Instagram. Face à une génération qui les juge et chouine quand il faut garder les petits enfants, ils font de leur mieux pour avoir l’air à leur aise alors qu’ils gagnent moins en travaillant que leurs parents retraités. Quand ils comprennent mieux le fonctionnement d’un site internet que leur boomer de manager parvenu jusqu’ici au cynisme et à l’ancienneté, ce dernier les « remet à zéro » et recrute à leur place une agence qui facture 25 millions d’€ des sites internet qui ne fonctionnent pas.

La génération Z enfin. Qui ne connait pas la couleur de l’argent, parce que même leurs parents n’en ont pas. Une génération vibrante, tolérante, qui se fout des statuts et des convenances mais qui préfèrerait sauver la planète plutôt que de faire fortune. Ils sont sur TikTok entre les mains de la Chine, parce que leurs ainés ont tellement peur des réseaux qu’ils ont préféré se planquer et critiquer que d’aller vérifier et de les protéger. Livrée au harcèlement sur les réseaux, coupée de l’information de leurs ainés parce que les médias traditionnels ne s’adressent plus à eux depuis longtemps. Une génération sacrifiée pendant le Covid, à qui on a expliqué qu’il fallait rester enfermés dans leurs chambres d’étudiants, mettre en danger leur parcours universitaire et manger aux Restos du cœur, pour ne pas risquer de « tuer » leurs  grands-parents, qui eux ont hurlé au scandale à l’idée de rester dans leurs grandes maisons le temps de l’épidémie par peur d’être « stigmatisés ».

C’est à cette génération que je dédie ce texte et mes livres. Ils sont notre avenir, ce monde en vrac leur appartient, et notre salut viendra d’eux lorsqu’ils se dresseront pour prendre la parole.

En raison de la segmentation des médias, nos générations ne se parlent plus. Je soutiens l’idée que nous subissons une accélération de l’histoire et des technologies, parce qu’afin de sauver le climat il nous faut d’abord le comprendre. C’est à cela que servent la science et la technologie. A s’interroger et comprendre, pas à avoir peur et stigmatiser les autres par flemme de les écouter parler.

Le résultat risque d’être catastrophique si nous n’y prenons pas garde.

Une autre accélération à prendre en charge avec courage est celle du capitalisme. Je ne parle pas du libéralisme, qui encourage la compétition loyale encadrée par des règles, mais bien du capitalisme et de la financiarisation, qui décourage le travail et la valorisation de l’individu et résulte dans la paralysie de l’économie et de la société.

J’aurais tendance à exclure ici les TPE et PME, car dans une entreprise de taille raisonnable, quand on jette l’argent par les fenêtres en raison d’un management incompétent, normalement, ça se remarque.

Dans les grandes entreprises en revanche, ainsi qu’au sein de l’Etat et des collectivités territoriales, c’est une autre histoire. Les sociétés capitalisées débordent tellement d’argent que les salariés sont payés à être inférieurs à leur manager, même quand celui-ci est tout à fait nul, et à trembler devant lui de se retrouver à ne rien faire au fond d’un placard.

Dans les collectivités territoriales c’est différent, on fabrique et paye des formations pour des gens qui n’en n’ont pas besoin, aux frais du contribuable. Supprimons les régions et recrutons des enseignants à la place, qui enseigneront WordPress et Prestashop au collège, ainsi que la création d’applications mobiles no code, et les formations inutiles de développeur web seront économisées.

Avec un peu de chance, les applications hors de prix qui ne fonctionnent pas seront économisés aussi, et le prix des billets de train deviendra enfin abordable.

Eventuellement, fort de cet exemple réussi de nos collégiens, notre président de la République apprendra peut-être à recruter des gens compétents plutôt que des agences de conseil hors de prix qui de plus se fichent de savoir ce qu’est le sens de l’Etat.

Dernière chose, la liberté d’expression. J’en appelle sur l’un de mes sites internet à la création d’un conseil de surveillance des algorithmes. Ceci pour réduire la fracture générationnelle qui est en train de naitre, mais aussi et surtout le spam et les caprices d’enfants pourris gâtés des propriétaires des réseaux, je pense notamment à feu Twitter et à Tiktok, mais aussi le spam des résultats de Google qui menace la liberté d’information.

L’argent n’est pas un vice en soi, cela dépend dans quelles mains il se trouve. La financiarisation, en revanche, est peut-être en train de manger l’économie en la rendant complètement maboule. Je suis trop jeune pour savoir à quoi ressemblait la vie en URSS, mais avec un peu de chance les choses fonctionnaient mieux de façon plus logique qu’en France aujourd’hui.

Si ce monde doit revenir à cette génération milléniale que l’on n’entend pas car ils sont sur des réseaux différents des nôtres, ils ont le droit de faire entendre leur voix sans se faire insulter, et de choisir leur avenir sans qu’on leur coupe la parole. Ayons la dignité de les écouter parler et de leur léguer un monde à la hauteur de leurs ambitions.